Le ministère de l’Immigration, de la Diversité et de l’Inclusion (MIDI) recourt à ses propres professeurs pour pallier les compressions effectuées par la Commission des partenaires du marché du travail (CPMT) dans les cours de francisation en entreprise.
Cette semaine, les cours de français ont repris chez Vêtements Peerless, de Montréal, après leur suppression l’an dernier quand la CPMT a réduit les sommes qu’elle consacrait aux cours de français sur les lieux de travail.
Le 9 février dernier, Le Devoir révélait que la CPMT, qui gère le Fonds de développement et de reconnaissance des compétences de la main-d’oeuvre, avait amputé de près de 50 % les subventions qu’elle verse pour la francisation des travailleurs sur les lieux de travail ou dans les locaux des syndicats. Ces compressions, appliquées à la faveur d’un durcissement des critères d’acceptation des projets de francisation, ont entraîné une diminution de la moitié des heures de cours de français en entreprise. Le nombre de travailleurs qui assistent à ces cours organisés par les syndicats est passé de 627 à 321, selon les données de Formation de base pour le développement de la main-d’oeuvre (FBDM), un organisme à but non lucratif mandaté par les syndicats de la FTQ et de la CSN pour se charger de la presque totalité de ces cours.
Or, le lendemain de la parution de l’article du Devoir, le directeur de la division vêtements des Teamsters et le responsable de la francisation chez Peerless, Mario Ayala, a reçu un appel du MIDI. Quelques jours plus tard, le ministère dépêchait un fonctionnaire sur place pour évaluer les besoins. Au cabinet de la ministre Kathleen Weil, on a confirmé qu’elle était intervenue personnellement pour que son ministère prenne les choses en main.
Cette semaine, des professeurs du MIDI ont donné leurs premiers cours à cinq classes, soit trois classes les lundis et mercredis et deux classes les mardis et jeudis. Ces cours se déroulent après la journée de travail, de 16 h à 18 h. En tout, 104 travailleurs — surtout des travailleuses — se sont inscrits aux cours, alors que Peerless compte 800 employés, des immigrants pour la grande majorité.
Auparavant, quand c’était la CPMT qui était la bâilleuse de fonds, les travailleurs étaient payés au salaire minimum pendant les heures de cours. Maintenant que les professeurs du MIDI remplacent ceux du FBDM, les travailleurs n’ont plus droit à ce modeste appoint. Ils sont tout de même plus nombreux maintenant à suivre les cours. Quand les activités de francisation furent abandonnées l’an dernier, 54 travailleurs y participaient et 90 personnes étaient inscrites sur une liste d’attente.
Cas d’exception
L’initiative qu’a manifestée le MIDI dans le cas de Peerless est une exception. De nombreux cours de francisation furent abolis dans d’autres fabriques de vêtements sans que le ministère lève le petit doigt, a signalé Raymond Larcher, le président de l’Union des employés et employées de service, section locale 800 de la FTQ (UES 800). La suppression du salaire payé pour les heures de cours a entraîné plusieurs abandons des travailleurs, a-t-il souligné.
En revanche, les employés d’entretien ménager représentés par l’UES 800 ont toujours droit à cette rémunération. La CPMT a cessé toutefois de payer leurs avantages sociaux. Elle a usé aussi de maintes tracasseries à l’endroit du syndicat, a mentionné Raymond Larcher, dans l’optique de réduire le nombre d’heures de cours offerts.
Selon les données fournies par le MIDI, les professeurs de l’État n’ont pas pris la relève des professeurs du FBDM pour les cours que ceux-ci ne donnent plus. L’activité des professeurs du MIDI en entreprise a même diminué cette année. Ainsi, en 2014-2015, les professeurs de l’État enseignaient à 469 travailleurs sur les lieux de travail alors que ce nombre, au lieu d’augmenter après les compressions de la CPMT, a chuté à 262 pour l’année en cours.
Source: Robert Dutrisac – Correspondant parlementaire à Québec – Le Devoir